Lisez attentivement le texte suivant :
Tel homme s’éveille, le matin, dans son lit. A peine levé, il est déjà de nouveau endormi ; en se livrant à tous les automatismes qui font son corps s'habiller, sortir, marcher, aller à son travail, s'agiter selon la règle quotidienne, manger, bavarder, lire un journal – car c’est en général le corps seul qui se charge de tout cela –, ce faisant il dort. Jette alors un regard sur ce que tu crois avoir fait depuis le commencement de cette journée : c'est peut-être la première fois que tu t'éveilles vraiment; et c'est seulement en cet instant que tu as conscience de tout ce que tu as fait, comme un automate sans pensée. Pour la plupart, les hommes ne s’éveillent même jamais à ce point qu'ils se rendent compte d'avoir dormi. Pour s’éveiller il faudrait qu’ils pensent : toute cette agitation est hors de moi. Il faudrait un acte de réflexion. Mais si cet acte déclenche en eux de nouveaux automatismes, ceux de la mémoire, du raisonnement, leur voix pourra continuer à prétendre qu’ils réfléchissent toujours; mais ils se sont encore endormi. Et ce sommeil, qui est l‘inertie de la conscience, a beau jeu de prendre l’homme dans ses pièges : car celui-ci, naturellement et presque irrémédiablement paresseux, voudrait bien s'éveiller certes, mais comme l'effort lui répugne, il voudrait que cet effort une fois accompli le plaçât dans un état de veille définitif ou au moins de quelque longue durée; voulant se reposer dans son éveil, il s'endort. De même qu'on ne peut pas vouloir dormir, car vouloir, quoi que ce soit, c’est toujours s'éveiller, de même on ne peut rester éveillé que si on le veut à tout instant. Mais si tu as choisi d'être éveillé tu t’es engagé sur un rude chemin, montant sans cesse et réclamant un effort de tout instant. Tu t'éveilles; et immédiatement tu dois t'éveiller à nouveau, tu t'éveilles de ton éveil. Ton éveil premier apparaît comme un éveil à ton éveil second. Au lieu que les autres hommes, pour le plus grand nombre, ne font que s'éveiller, s'endormir, s’éveiller, s’endormir, monter un échelon de conscience pour le redescendre aussitôt (ce serait même peut-être plus commode, sans rien changer à l'apparence, de ne pas s'éveiller du tout) ; toi tu te trouves et te retrouves selon une trajectoire indéfinie d'éveils toujours nouveaux.
René Daumal, Tu t'es toujours trompé
Au brouillon : 1) Relever les concepts les plus importants et chercher à les définir d'après le sens que l'auteur leur donne (et non pas d'après le larousse ou wikipédia
)
2) Découper le texte en 2 ou 3 ou 4 parties qui vous semblent logiques, et tenter de formuler le plus clairement possible l'idée de chaque partie.
3) Chercher à résumer l'idée essentielle du texte en une seule phrase. Cette phrase doit correspondre à la position de l'auteur (=thèse), ce qu'il veut montrer dans ce texte.
4) Chercher à quoi l'auteur veut s'opposer, contre quelle doxa (opinion commune) il veut s'affirmer.
5) Enfin, chercher quel problème l'auteur tente (plus ou moins efficacement) de répondre. Si ce texte était la réponse de l'auteur à une question philosophique, quelle serait cette question?
Vous pouvez maintenant rédiger l'introduction, en suivant cet ordre :-Amorce (situation dans laquelle se poserait la question que vous avez trouvé en 5)
- Posez la question et montrer en quoi elle pose problème, quel est son enjeu philosophique.
- Montrer la thèse de l'auteur (en réponse à cette question) et la doxa à laquelle il s'oppose (étapes 3 et 4).
- Montrer le plan de son argumentation (correspond au découpage effectué en 2)